C’est dans une parfaite symbiose
avec la SFSC, son idéal, ses projets, que je pratique depuis vingt
ans la sexologie.
Lorsque, lassé de ne savoir rien répondre à certaines questions de mes patients,
j ’ai décidé de devenir sexologue, je ne me souviens plus comment j ’ai abouti à
la SFSC, sans doute simplement parce que dans les années 80 c ’était la seule
société savante à dispenser un véritable enseignement.
J ’y ai rencontré les pionniers de la sexologie en France …
Charles Gellman, Gérard Vallès, Ludwig Fineltain, et quelques
autres. J ’y ai entendu d’emblée un discours d ’une rare qualité dans sa
conception, son érudition, son ouverture d ’esprit.De nombreux stages proposaient diverses approches thérapeutiques parmi lesquels chacun pouvait
faire ses choix. Je me souviens non sans nostalgie de petits déjeuners de travail à
La Coupole ou d ’un certain congrès où le pasteur Doucet avait du mal à dissimuler une forte odeur de souffre sous
son onction sacerdotale …
Depuis la sexologie a beaucoup évolué.
Des notions nouvelles, celles de santé sexuelle et de médecine sexuelle se font
jour. Accueillons-les avec enthousiasme et …circonspection. La Santé en général
est un dogme dans nos sociétés postmodernes où le pouvoir infiltre le savoir.
N ’oublions pas de considérer la santé comme cette homéostasie fragile où la
limite entre le normal et le pathologique est toujours imprécise comme nous l’a
appris il y a déjà longtemps Georges Camguilhem.
En dépit de ces réserves nécessaires il faut bien constater que nous vivons une
époque passionnante.
Les progrès de nos connaissances, en particulier concernant la neurobiologie
de l ’érection commencent à lever le voile de silence et de mystère qui enveloppait
les notions de désir et de plaisir, même si la recherche scientifique n ’en est dans
ce domaine qu ’à ses premiers pas. La découverte de molécules permettant
per os de restaurer l ’érection est une révolution aussi importante que celle de
la «pilule »contraceptive dans les années soixante-dix. Bien qu ’elles ne
soient pas au sens propre des aphrodisiaques, elles réalisent le rêve ancestral
de l ’homme de maîtriser sa puissance sexuelle, jusque dans ses dimensions
les plus ludiques.
Bien entendu, chacun en convient, leur utilisation ne doit pas faire oublier le
contexte psychologique dans lequel on les prescrit, non plus que le rôle central
du sexuel dans la psyché.
Mais,on en parle moins, leur efficacité ne peut que modifier à plus ou moins
long terme la sexualité humaine, le rapport de l ’homme à sa phallicité,
les relations homme-femme, les comportements érotiques et jusqu ’à la conception
de la vie amoureuse (ni Cesare Pavese, ni Romain Gary ne se seraient sans
doute suicidés si ce secours médicamenteux leur avait été
offert). Ce sont de nouvelles données dont la sexologie d ’aujourd ’hui et de demain se doit de
tenir compte et, loin de restreindre le champ de notre pratique ces perspectives ne font que l ’étendre encore.
La sexologie sera toujours un art au carrefour des sciences humaines.
A l ’heure où les sociétés savantes se multiplient, la SFSC a su garder sa spécificité,
sa hauteur de vue, sa largeur d’idées, son humanisme... On ne peut
qu ’en être reconnaissant à Marc Ganem, à Nicole Arnaud-Beauchamps et à
l ’équipe qui l ’a dirigée depuis quelques années. Il nous faudra veiller à ce que
cela soit sauvegardé dans l ’avenir.
Quand nos amis du Conseil d ’Administration m ’ont fait l ’honneur de me désigner à la suite de la disparition de notre
ami Gérard Vallès à la présidence de l ’Académie de Sciences Sexologiques je
l ’ai vécu comme l’accomplissement d ’un long compagnonnage.
La première journée que j ’ai pu organiser le 16 janvier avec l ’aide très efficace
de Philippe de Boisgisson a été pour moi un véritable bonheur aussi bien
grâce à la qualité de l’intervenant André Bonaly que grâce à celle de l ’assistance
où se mêlaient harmonieusement anciens et nouveau venus. Je pense par
ailleurs que nous n’avons pas failli au climat d’amitié et de convivialité qui a
toujours caractérisé cette journée.
André Bonaly nous a exposé avec une merveilleuse clarté et un grand talent
pédagogique l ’application de sa théorie du temps fractal à la
sexologie. Cet éclairage original de la sexualité et de ses problèmes a suscité beaucoup d
’intérêt et de questions de la part de l ’auditoire,même si l ’on comprend que sa
nature un peu systématique ait interrogé certains esprits :
Ludwig Fineltain ,Gilles Formet, ou France Paramelle, par
exemple. Faire d ’avantage entrer la temporalité sous un nouveau concept dans
notre approche diagnostique et thérapeutique me paraît une possibilité
intéressante.
Ce jour-là l ’Académie de Sciences Sexologiques a été fidèle à sa vocation
de réflexion désintéressée sur notre discipline.
Je remercie notre Président d ’avoir fait une place importante à cette journée
dans Sexologos puisqu’il m ’en a confié l ’éditorial en même temps qu ’il y publie
l’intervention d ’André Bonaly.
Je souhaite que notre Académie, émanation directe de la SFSC continue à
tenir avec vigilance le rôle de témoin de nos valeurs éthiques et de notre exigence intellectuelle.
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