J’ai eu envie de parler de moi aujourd’hui, je veux dire aussi de nous tous, sexologues par passion, nous qui travaillons depuis tant de temps dans un champs que nous appelons la Santé Sexuelle.
Mythe ou réalité, tel est le titre de mon propos dont vous connaissez déjà la réponse, sinon vous ne seriez pas là. 26 ans de travail, de recherche, d’investissements personnel dans un domaine tabou, la sexualité, cela méritait réflexion ! Une réflexion du dedans, une réflexion intimiste sur une notion dont tout le monde parle, s’empare et glose afin de l’appréhender. Deux mots Santé et Sexuelle, dont on ne sait qui à la primauté et si le propos est bien l’accolement, tant la dissonance semble criante, de prime abord. Réfléchissons ensemble sur sa légitimité. Est-elle si importante cette Santé Sexuelle ? A priori non, car elle n’existe même pas dans le célèbre aphorisme latin « Mens Sana in corpore sano ». Mais toute la question est là ! N’est-elle pas le pivot de cet aphorisme par son absence régulatrice ? La Sexualité est toujours TROP ou pas ASSEZ, dans les mots de nos patients, dans les mots de la souffrance, dans MES mots d’aujourd’hui. La Sexualité c’est fondateur et structurant. La Sexualité c’est nous tous au quotidien dans cette recherche d’un équilibre si difficile à atteindre qu’il en devient une drogue, une recherche, un parcours …… une éthique. La Santé s’affiche partout dans les médias pour se vendre ou faire vendre, pour représenter l’Illusion du bonheur absolu, celui qui occulte la Mort, procure la puissance et donne l’illusion, la grande, la seule, la vraie, celle de l’Immortalité.
Accoler Santé et Sexualité c’est peut-être comme écrire un pléonasme, le PLÉONASME existentiel de la VIE. Nés d’une sexualité, structurés à partir d’elle, en recherche quotidienne d’elle, ressentie ou oubliée, mais sans cesse renouvelée par un cerveau archaïque, têtu, et beau par son entêtement à générer du désir, nous marchons dans notre vie à la recherche d’une sexualité idéale, dont l’orgasme est le moteur et l’amour, le parfum qui habille les pulsions. Relation étrange et synergique qu’un rapport sexuel, car il nécessite la mise en œuvre des quatre personnages que sont notre inconscient et notre corps et l’inconscient et le corps de l’autre. De cette grande quandrangulation, naissent tous les problèmes qui nous sont exposés dans le quotidien de notre travail, dans le quotidien des absences, des silences, des rejets de son propre corps ou du corps de l’autre. Dans le quotidien de notre de notre propre vécu, dont l’équilibre nous est si important pour pouvoir percevoir, entendre et ensuite ÉCOUTER, le déséquilibre de ceux qui souffrent et osent enfin venir nous le dire. La grande question n’est pas la souffrance, TOUT le monde souffre, eux, vous, moi, de ne pas avoir cette sexualité idéale, qui nous meut et nous émeut. La grande question est le silence, le non dit, la honte et la culpabilité de sa propre honte à travers une fonction, la Sexualité, dont la nécessité apparaît à tous et dont le rejet est le crime le plus banalisé sur terre. Crime léger, NON plus maintenant. Crime plus présent dans le rejet d’un lien proposé dans une relation duelle. Crime plus déstructurant dans la répétitivité de la négation de l’autre à travers des plaintes dont les noms nous sont familiers, désir, (pas envie), trop tôt, (EP), pas possible (DE), absence (ANORGASMIE). Crime parfait que sont les crimes contre soi-même à travers une sexualité déniée à l’autre, mais avant tout à soi, car elle est alors refusée dans sa dimension la plus belle, l’amour de soi, mais effrayante pour beaucoup, pour trop de gens, car génératrice d’un concept d’égoïsme combattu par ceux qui ont transformé la sexualité en un langage que ne reconnaît pas notre corps. En effet, comment donner, se donner, appartenir, s’ouvrir, s’abandonner à l’autre si l’on n’est pas soi-même prêt physiquement et dans une maturité, égoïste mais nécessaire, à se donner à soi. Qu’elle est dure cette réalité que nous tous essayons de porter à leur connaissance, à travers toutes les thérapies qui existent et que nous leur proposons, cette réalité qui consiste à essayer de s’aimer pour vraiment aimer l’autre. Des balbutiements, des premières masturbations, celles dont nous nous souvenons, à celles enfouies dans notre mémoire, à la multiplication des partenaires afin de rechercher l’autre, idéal, mais en fait nous-mêmes, au premier rapport dont le mot évoque à la fois la rentabilité, le jugement et le lien à l’autre. La Sexualité joue à cache-cache avec nous, afin de nous rappeler dans sa nécessité biologique, mais aussi et surtout la réalité d’une santé dont notre cerveau, lieu de notre inconscient, de notre conscient et de notre Sexualité, a besoin pour ne pas imploser dans un carcan, dont le nom est boîte. La boîte crânienne et dont l’échappatoire est le corps, le nôtre, c’est-à-dire celui que nous n’entendons que quand il ne va pas , ou quand-il exulte dans l’amour. En effet, le corps est le BOOMERANG du cerveau, celui qui souffre quand souffre la sexualité. Combien de maladies dites psychosomatiques trouvent leur berceau dans une anomalie de la sexualité, et dont les plus fréquentes sont le CANCER et la DÉPRESSION. Certes, tous les cancers et toutes les dépressions n’ont pas une étiologie dans une carence sexuelle, mais cette étiologie existe et apparaît de plus en plus dans les grandes séries. Toutes les équipes qui intègrent un sexologue dans la prise en charge des cancers affichent de bien meilleurs résultats que les autres. Toutes les dépressions prises en charge par une recherche d’un nouvel équilibre où la sexualité retrouve une place, sa place, voient leur délai de guérison réduit et leur taux de rechutes au plus bas. Quelques chiffres pour réfléchir : Savez-vous que ; - 70 % des divorces ont lieu dans les 2 ans qui suivent la naissance d’un enfant et parmi eux plus de 50 % sont dus à une mésentente sexuelle. Faut-il vous rappeler que ; - Bon nombre des violences conjugales, trop hélas, sont dues dans l’immédiat à un refus de sexualité ou à distance, du fait d’une agressivité trop longtemps refoulée à cause de frustrations sexuelles répétées. Aux couples de savoir ne pas en arriver là, car la femme n’est pas un objet que l’on prend, que l’on utilise et que l’on jette. À Paris, la moitié des femmes tuées le sont, par leur conjoint et les violences conjugales sont, de ce fait, une des causes principales de mortalité des femmes. Le fait qu’une telle pensée, la violence, existe de façon universelle ne la banalise pas. Cette pensée n’est pas rien et quand elle devient un acte, elle transgresse une limite, celle des corps et de la non sexualité. Enfin osons dire qu’en France ; - L’alcool et le tabac, addictions sociales par excellence, trouvent souvent une pérennisation, non seulement dans le fait que ce sont des drogues mais aussi dans la solitude sexuelle supposée ou ressentie comme un rejet d’identité.
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