Au-delà même
des faits, que nous connaissons mal, la défense de Polanski (tout au moins de
ses présumés actes) se doit d’être prudente.
Comment justifier qu’il ait versé une somme conséquente à cette jeune fille (ou
sa famille) si ce n’est parce qu’il se savait «hors la loi» ? Ou bien avait-il
tant mauvaise conscience ? Il y a, certes, une forme d’élégance intellectuelle à
vouloir toujours préserver la liberté, quitte à bousculer les règles, mais
défendre le comportement de Polanski équivaut à refuser toute limite : si avoir
une relation sexuelle avec une mineure n’est plus répréhensible, autrement dit
si on récuse cette barrière qu’impose notre situation d’adulte à l’égard d’un
enfant, si le consentement d’un enfant mineur suffit à justifier les actes d’un
adulte, doit-on penser que le consentement de nos patient(e)s suffira pour
excuser nos passages à l’acte ? La loi judicieusement a décidé qu’il ne pouvait
y avoir consentement d’un mineur : ainsi la qualification de viol sur enfant ne
nécessite pas qu’il y ait menace, violence ou contrainte, préservant ainsi
l’enfant de la séduction d’un adulte (la confusion des langues). On peut
regretter ou discuter l’opportunité d’un procès intenté tant d’années après les
faits et après qu’une «réparation» ait eu lieu (aux dires de la victime) mais on
ne peut contester la gravité des faits.
En ce qui concerne Frédéric Mitterrand, le manque d’élégance est ici certain :
la bonne conscience dont se prévalent les critiques est de nature douteuse. D’un
roman où l’auteur révèle, douloureusement, ses penchants vers des hommes jeunes,
la rumeur fait de Frédéric Mitterrand un défenseur de la pédophilie.
Sous le couvert de la moralité, les détracteurs de Mitterrand font état d’une
pensée perverse : ils jouent à la fois sur un sentiment d’homophobie et sur
l’amalgame entre homosexualité et pédophilie.
Plus pervers encore, l’objet visé par les attaques est probablement en fait
ailleurs : la politique du Président Monsieur Sarkozy et plus précisément sa
politique d’ouverture. Ce livre qui avait plutôt fait l’objet de critiques
positives quelques années auparavant est devenu un objet de scandale… utile. Il
permet de signifier, en quelque sorte : «Voyez qui il a choisi dans son
gouvernement». Il n’est pas si étonnant alors que les deux pourfendeurs de
Frédéric Mitterrand, Benoît Hamon et Marine Le Pen, se retrouvent dans un même
combat ! Il s’agit en effet de tout à la fois discréditer la politique de
Nicolas Sarkozy tout en punissant ceux qui ont osé ou qui seraient tentés d’y
répondre.
Il me semble qu’il n’y a ainsi qu’une similitude fondée entre ces deux cas : la
cruauté du temps qui n’efface rien.
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