Démystifier l’anticipation négative

Docteur Marie Hélène COLSON



La perte d’érection est un événement fréquent dans la vie sexuelle d’un homme. Il arrive que cette banale « panne sexuelle » se répète, et s’organise en « maladie Dysfonction Erectile », associant étroitement éléments d’ordre organique, psychologique et relationnel, se renforçant mutuellement et s’organisant en un véritable « cercle vicieux ». Parmi les mécanismes psychologiques permettant le déclenchement, l’entretien, le renforcement de ce cercle vicieux, l’anticipation pathologique tient une place prépondérante.
L’anticipation est un jaillissement, un facteur de progrès, d’expérience, de confiance en l’expérience à venir. Elle permet à l’individu l’engagement dans un futur porteur de promesses. Mais elle peut aussi devenir facteur de limitation, de blocage. L’anticipation se matérialise alors en angoisse et transforme l’expérience du temps à venir en une impossibilité de réalisation.
Il semble exister deux grands types d’attitudes face à la perte d’érection, nourries par des traits de fonctionnement psychologiques différents, et correspondant à deux formes d’anticipation pathologique. Bien que sous tendues par des mécanismes différents dans leur forme, ces attitudes reposent sur une expérience du temps faussée dans ses représentations. Chez les sujets de type anxio-évitant ou anxio-dépendant, c’est la crainte de la répétition d’un passé où l’on a été confronté à la perte d’érection qui pousse à l’évitement de toute stimulation sexuelle ou érotique, rendant ainsi définitivement impossible tout engagement sexuel et donc toute érection. Chez les sujets de type anxio-phobique, anxio-sensitif, ou perfectionnistes, c’est la crainte d’un futur qui ne permet pas la réalisation sexuelle attendue qui va faire se répéter à l’infini une action sexuelle stéréotypée, qui a perdu son sens au détriment du seul désir d’une érection impossible à obtenir. Quelque soit la forme prise par l’anticipation pathologique, c’est l’expérience du temps vivant dans sa sexualité qui permet l’accès à la guérison. Pour les uns, il s’agira de retrouver la confiance dans l’action sexuelle à venir, pour les autres, de renouer avec la relation à deux et d’éprouver le plaisir de l’attente entre désir et réalisation sexuelle. Pour tous deux, l’essentiel est de renouer avec un savoir être-éprouver-partager, en remplacement d’un savoir faire-montrer-démontrer.

CV

· Directeur d’enseignement des DIU de Sexologie à Marseille et Montpellier, marie hélène Colson est médecin sexologue, et Secrétaire Général de l’AIHUS. Elle est auteur de « réaliser sa sexualité » (Press pocket) et de « Sexualité au masculin, l’harmonie retrouvée » (ed. Michel Servet).



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