Mars    2012

Sexologos   #  02

Claude ESTURGIÉ 


BILLET D’HUMEUR
de Claude ESTURGIÉ.
 

 

Quand le genre entre à l’école… 

 

 

 

L’introduction de la théorie du genre dans les manuels scolaires de 1iére, ainsi qu’à un moindre degré l’ouverture d’un enseignement sur les « gender studies » américaines à Sciences Po, créent, comme on pouvait s’y attendre, beaucoup de remous non seulement dans les médias, radios, presse écrite, mais aussi au sein des milieux politiques (avec entre autres la démarche d’un député UMP) et religieux, comme en témoignait en particulier un article paru dans Le Monde du 12 septembre.

Ce qui me semble ressortir de ces réactions diverses, aussi bien favorables que le plus souvent hostiles, et jusque dans la rédaction de ces manuels ou à tout le moins des citations qui en sont faites dans cet article, c’est une extrême confusion entre les notions certes assez complexes que sont l’identité sexuelle, l’identité de genre et l’orientation sexuelle.

Il est important de préciser ces notions car le fait que les plus pertinentes théoriciennes du Genre, et je pense bien sûr à Judith Butler mais aussi à quelques autres, n’aient jamais fait mystère de leur lesbianisme ne simplifie pas les choses auprès d’un public non ou mal averti.

Le sexe biologique, anatomique est un fait génétique et un constat, le genre est une représentation mentale. «L’anatomie, écrivait Freud, c’est le destin», nous savons pourtant combien le destin sexuel peut être différend du sort que semble lui réserver l’anatomie. La notion de genre pour la raison même qu’elle peut permettre la confusion apparente des sexes n’a pu s’établir que sur l’évidence visible de leur différence.
Les variations ou aléas de l’identité de genre ne remettent en cause l’identité sexuelle que dans un seul cas qui reste exceptionnel : celui du vrai transsexualisme c’est à dire le cas de ces hommes ou des ces femmes qui se sentent en exil dans un corps qui leur a été toujours étranger et n’ont de paix ni de cesse que lorsqu’ils obtiennent l’adaptation de leur sexe à leur genre.

L’orientation sexuelle n’est pas une identité, même si certaines minorités sexuelles peuvent parfois le revendiquer par défi, elle se définit seulement par le choix d’objet sexuel : l’hétéro sexualité s’accommode fort bien de diverses fluctuations de l’identité de genre et l’homosexualité se réalise fréquemment dans des choix d’objets hétérogenraux.

Le genre est une réalité sociale indiscutable. En parler à des adolescent(e)s en classe de première, à l’âge où ces questions se posent souvent avec beaucoup d’angoisse ne peut que les aider à sortir de la confusion du désir, du genre et du sexe et leur éviter de chercher des réponses dans des expériences qui ne peuvent que l’aggraver.

Encore faudrait-il que ce discours soit clair dans l’esprit de ceux- là même qui l’énoncent, ce qui, à ce que j’en lis jusqu’ici, ne me paraît pas évident.
 

Claude Esturgie
Vice- Président de la Société Française de Sexologie Clinique

 

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