Sexologos  n° 09

Septembre 1999

Jacques CHAUMERON  

 

 

Chronique des 
rencontres annoncées
.

 

Elle était à nouveau arrivée en retard, essoufflée Pauline, jeune femme de 23 ans, étudiante, dont les grands yeux bleu-clair semblaient apeurés lorsqu’elle s’installa dans le bureau. Son regard fouillait la pièce, sa respiration était retenue. Elle passait sans arrêt la main dans ses cheveux non pas pour les réinstaller, mais comme pour chasser des peurs.

Elle commença par parler de ses difficultés à vivre, de ses doutes et de son indécision, de cette terrible exigence qu’elle avait d’elle même, mais qui l’amenait à renoncer dès qu’elle touchait l’issue des projets qu’elle mettait en place, de son échec universitaire.
Elle parlait de ce comportement très tranché qu’elle avait dans sa relation aux autres et qui de fait l’isolait. Elle parlait de sa souffrance.

Plus jeune enfant d’une famille de trois, elle a deux frères. A l’âge de 9 ans un jeu avec son aîné (il a 15 ans à l’époque) se termine par des attouchements et une découverte sexuels. Durant les deux années qui vont suivre, ces jeux se reproduiront allant jusqu’à une sexualité coïtale. Elle pourra dire à la fois ce sentiment de contrainte et de
désir diffus qu’elle ressentait, quand elle allait rejoindre son frère dans sa chambre.

Le temps de la parole était venu pour elle. Le dire enfin aux parents, lever le secret. Elle sentait qu’elle devait d’abord en parler avec son père. Elle le décrit alors extrêmement gêné, dit qu’il a un discours banalisateur sentant derrière un souci de disculper le fils. Et c’est alors qu’il révéla qu’il avait eu lui-même des jeux sexuels avec la plus jeune de ses sœurs, jeux sur la nature desquels il restera silencieux mais suffisamment explicite. «on ne peut pas dire qu’ils étaient complètement sexuels».

Alors seulement un souvenir lui revint, celui d’un lapsus répétitif de son père qui, quand elle était petite, au lieu de la prénommer PAULINE, la prénommait PASCALE, prénom de la plus jeune des sœurs du père.

Entre inceste et «Oedipe», désirs indicibles. 

(à suivre ...)

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